Une politique agricole efficace au service de la lutte contre la pauvreté

Une politique agricole efficace au service de la lutte contre la pauvreté

La population malgache est essentiellement rurale (80% de la population active travaillent dans le secteur agricole) et pratique une agriculture tournée vers l’autoconsommation et l’économie de subsistance.

La principale culture de Madagascar est le riz, qui est cultivé dans tout le pays. Viennent ensuite le maïs, le manioc, le café, le cacao, le sucre, les légumes et les fruits. L’élevage de bétail (zébus, chèvres et moutons), constitue également une activité importante à Madagascar.

Malgré l’importance de l’agriculture pour l’économie de notre pays (elle représente à elle seule, environ 30% de son PIB), le secteur est confronté à de nombreux défis, parmi lesquels figurent :

– la faible productivité des terres agricoles : celle-ci est essentiellement liée à l’érosion des terres, à un épuisement constant des sols, aux risques naturels fréquents (cyclone, inondation, sécheresse et invasion acridienne), au manque d’infrastructures indispensables à la mise en circulation et la transformation des produits récoltés etc.
– l’insuffisance de matériel et technologies agricoles adaptés aux conditions locales: les exploitations sont peu équipées en matériel agricole adéquate, alors que les contraintes liées à la préparation du sol et à l’installation de la culture sont fortes ;
– le morcellement des exploitations familiales : La taille médiane d’une exploitation agricole à Madagascar est trop faible (environ 1 hectare) ;
– la faible utilisation des intrants (engrais, amendements, produits phytosanitaires, activateurs de croissance et semences) ;
– et le manque de financement, de formation et de connaissances des agriculteurs : à Madagascar, les aides destinées aux agriculteurs sont très largement insuffisantes et la formation professionnelle demeure le parent pauvre du système éducatif.
Ces défis sont loin d’être insurmontables. Il est en effet possible de renforcer l’agriculture à Madagascar, de contribuer à la croissance économique et de réduire la pauvreté dans le pays. Pour cela, il faudrait commencer par définir les grandes orientations de la politique agricole pour les dix prochaines années (I) et mettre en œuvre une politique de redistribution des terres cultivables aux agriculteurs malgaches (II). Sans quoi, notre agriculture ne pourra assurer la subsistance que de ceux qui la pratiquent.

I – Une politique agricole plus juste, plus respectueuse de l’environnement et davantage fondée sur l’efficacité

A) Une politique agricole plus juste

L’État doit être le garant de l’équilibre financier de nos producteurs agricoles en leur assurant des revenus plus équitables à travers la mise en place d’un contrat tripartite qui lie l’agriculteur, le transformateur et le distributeur, contrat dans lequel il sera précisé que le prix négocié ne peut être inférieur au prix de production (interdiction des ventes à perte). Protéger aujourd’hui nos agriculteurs, c’est assurer notre indépendance alimentaire sur le long terme.

L’État devra également soutenir financièrement et matériellement nos agriculteurs, et s’évertuera à accompagner (à travers des formations professionnelles) tous ceux qui ont recours à des pratiques de culture et d’élevage soucieuses du respect de l’environnement.

B) Une politique agricole soucieuse de l’environnement

Les autorités publiques devront impérativement mettre en place des politiques de gestion durable des ressources naturelles afin de protéger l’environnement tout en soutenant une agriculture productive à long terme.

La mise en place par l’Etat de plusieurs niveaux de certification permettra de garantir une communication loyale sur les produits biologiques et favorisera, a fortiori, l’exportation de nos surplus agricoles vers des pays étrangers.

C) Une politique agricole fondée sur l’efficacité

L’efficacité d’une politique agricole repose sur sa capacité à régler les problèmes auxquels est confrontée notre agriculture (faible productivité et manque de matériel agricole adapté).

S’agissant de la faible productivité de notre agriculture, il existe plusieurs solutions qu’il conviendrait de mettre en place dans notre pays. Aussi l’État devra-t-il :

– favoriser l’investissement dans la recherche et le développement : en investissant dans la recherche et le développement de technologies agricoles adaptées aux conditions locales, on peut améliorer les rendements et la durabilité de l’agriculture à Madagascar ;
– renforcer l’accès aux ressources : en veillant à ce que les agriculteurs aient accès à des semences de qualité, à l’eau et à des intrants de qualité, on peut améliorer la productivité de l’agriculture ;
– mettre en place un soutien à la commercialisation des produits agricoles : en aidant les agriculteurs à accéder à des marchés plus vastes et à obtenir des prix plus élevés pour leurs produits, on peut augmenter la rentabilité de l’agriculture et inciter les agriculteurs à produire davantage ;
– et généraliser la formation et l’éducation de nos agriculteurs : en offrant des formations aux agriculteurs sur les pratiques agricoles efficaces et durables, on peut les aider à améliorer leurs compétences et leur productivité.
Comme il a été dit plus avant, la faible productivité de notre agriculture est aussi due à l’érosion et à l’épuisement des terres agricoles. Pour lutter contre ces phénomènes d’érosion et d’épuisement de nos champs, il est nécessaire de :
– mettre en place des pratiques agricoles durables : en adoptant des pratiques telles que la rotation des cultures, l’agriculture de conservation et l’utilisation de semences améliorées, les agriculteurs peuvent contribuer à protéger les sols de l’érosion et à maintenir leur productivité à long terme ;
– restaurer les sols dégradés : en mettant en place des programmes de restauration des sols, on peut aider à rétablir la qualité et la productivité des sols qui ont été gravement endommagés par l’érosion ou l’épuisement ;
– planter des arbres : en plantant des arbres sur les terrains agricoles, on peut protéger les sols contre l’érosion en créant une barrière physique contre les vents et les pluies. Les arbres peuvent également améliorer la qualité des sols en fixant l’azote et en ajoutant de la matière organique au sol ;
– enfin, réglementer et planifier le développement : en mettant en place des lois et réglementations pour protéger les terres agricoles, ainsi que des plans de développement qui tiennent compte de l’importance de ces terres pour l’agriculture, on peut limiter les activités qui peuvent nuire à la qualité des sols.

Il est important de souligner que la lutte contre l’érosion et l’épuisement des terres agricoles nécessite une approche intégrée qui tienne compte de tous les facteurs qui peuvent affecter la qualité des sols.
Pour finir, le manque de matériel adapté à l’agriculture locale est un véritable problème pour les agriculteurs de notre pays. Selon moi, l’une des solutions possibles à ce problème serait de créer des entreprises publiques locales ayant vocation à concevoir et à fabriquer des équipements agricoles à bas coûts, capables de répondre aux besoins spécifiques de nos agriculteurs.
Comme souvent, ces solutions connus de tous nécessitent une véritable volonté politique. Il en est de même de la politique de redistribution ou de donation des terres agricoles.

II – Pour une politique de redistribution ou de donation des terres agricoles à Madagascar

A) La nécessité d’une politique de redistribution des terres agricoles

La politique de redistribution des terres agricoles vise à réorganiser la répartition des terres cultivables dans le but de favoriser une répartition plus équitable des terres entre les différents producteurs agricoles. Pour mener à bien cette réforme, l’État devra par exemples :

– nationaliser certaines terres agricoles : elle consiste à confier la propriété des terres agricoles à l’État ou à des organisations publiques ;
– créer des coopératives agricoles : il s’agit de structures qui appartiennent à des agriculteurs et qu’ils gouvernent eux-mêmes et qui se fixent des objectifs communs, tels que la production et la commercialisation de produits agricoles, l’achat de matériel et de services collectifs ou encore l’accomplissement de travaux agricoles. Les coopératives agricoles ont souvent pour but de renforcer la position des agriculteurs sur le marché en leur permettant de bénéficier d’une économie d’échelle, de meilleures conditions de vente et de prix, ainsi que d’un accès à des services de qualité à des coûts réduits.
– mettre en place des programmes de location de terres à des agriculteurs : Ces programmes consistent à mettre à disposition des agriculteurs des terres qui leur sont louées pour une période déterminée, généralement en échange d’un loyer. Les programmes de location de terres peuvent être une option intéressante pour les agriculteurs de notre pays qui ne disposent pas de terres ou qui n’ont pas les moyens de les acheter. Ils peuvent ainsi avoir accès à des terres pour exercer leur activité agricole et contribuer à la sécurité alimentaire de Madagascar.

B) La possibilité de redistribuer, à titre gracieux, des terres agricoles

Gardons à l’esprit que la superficie des terres cultivables à Madagascar est de l’ordre de 36 millions d’ha, alors que dans le même temps seulement 3 millions d’ha sont effectivement exploités par nos agriculteurs.

C’est pourquoi, il serait judicieux pour l’État, de mettre à disposition, et ce à titre gratuit, des terres agricoles aux paysans les plus démunis de notre pays.

L’objectif de la politique de redistribution des terres agricoles est de promouvoir une agriculture durable et de réduire les inégalités économiques et sociales dans les zones rurales. Elle peut également aider à promouvoir une meilleure utilisation des ressources naturelles et à améliorer la sécurité alimentaire à long terme.

Pour autant, la politique de redistribution des terres agricoles peut susciter des controverses, en particulier si elle implique la confiscation de terres privées sans compensation adéquate. Il est important de mettre en place des processus transparents et équitables pour mettre en œuvre cette politique de manière à minimiser les conflits et à garantir que les intérêts de toutes les parties concernées soient pris en compte.

La mise en place de toutes ces réformes supposent au préalable de consulter les agronomes, les conseillers et les spécialistes en agriculture.

Parallèlement à toutes ces initiatives, l’objectif à terme serait de faire en sorte qu’une part significative de la population malgache bascule vers le secteur secondaire et le secteur tertiaire.

Puissent ces quelques recommandations illuminer nos dirigeants pour mener à bien les réformes nécessaires à l’amélioration des conditions de vie de nos compatriotes.

Que Dieu bénisse le peuple malgache et protège notre Nation !

Gianni Rakotonanahary